Église Notre-Dame-des-Neiges
Présentation du circuit
Un bout d’histoire de Trois-Pistoles
Quand la communauté de Trois-Pistoles demande à l'évêque la permission de construire l’église Notre-Dame-des-Neiges en 1881, elle sait ce qu’elle veut, autant quant à son emplacement qu’à sa prestance. Le village en est alors à sa cinquième église. Il est courant, à cette époque, de changer plusieurs fois de lieu de culte dans une même paroisse, au gré de la croissance ou du déplacement de la population.
Les trois premières maisons de Dieu, plus rudimentaires, étaient établies en bordure du fleuve, près du terrain de tennis actuel. Pour protester contre le parti-pris de l’Église pour le Bas-Village, des paroissiens avaient érigé eux-mêmes leur propre temple en haut, sur le coteau, sans plans d’architecte. Cette « guerre de clochers » a d’ailleurs souvent inspiré le Pistolois le plus illustre, l’écrivain et dramaturge Victor-Lévy Beaulieu.
Malgré sa structure instable, ce quatrième temple deviendra l’église officielle. Quelques années plus tard, on ordonnera la construction de l'église actuelle à côté de la quatrième église, à l’emplacement du cimetière, qui lui, fut déplacé.
L’architecte David Ouellet prend le projet au sérieux. Quand le diocèse lui demande de retrancher des éléments trop ambitieux à ses plans, il menace de se retirer. En 1882 s’amorce donc l’érection de cette opulente église de bois et de pierres, qui sera reconnue comme l’une de ses réalisations les plus abouties. Le concepteur aura eu raison de tenir son bout, car son œuvre est aujourd’hui classée parmi les joyaux patrimoniaux exceptionnels.
Exemple probant d’un type d’architecture éclectique, qui emprunte à différents styles, elle se distingue notamment par ses cinq clochers, un luxe rarissime dans la Belle Province. Sa tour lanterne à la croisée du transept ajoute également de l’envergure à la structure. Les entrepreneurs J. Hubert Morin et Augustin Audet effectuent les travaux.
Trois sculptures colossales, créées par le fécond Louis Jobin, sont déposées sur les clochers de la façade, affrontant vents et tempêtes. Sur la tour nord, la représentation de l’archange saint Michel, qui avait résisté à plusieurs intempéries, tombe malheureusement au sol en 1988. Les artisans de Saint-Jean-Port-Joli reproduisent alors l’œuvre en acrylique. Il est encore possible d’admirer la statue originale, faite de cèdre rouge et recouverte d’une chape de plomb, dans le jubé de l’église. En 2013, la Vierge et l’enfant, saint François-Xavier et de nouveau saint Michel s’éclipsent, le temps de subir une cure de jouvence sous les bons soins du Centre de conservation de Québec. En juin 2014, les trois statues regagnent leur clocher respectif sous le regard amusé des citoyens.
Avec le même orgueil et le même budget que David Ouellet, une équipe menée par Joseph-Pierre Ouellet s’attaque au décor intérieur au tournant du 19e siècle, à partir de plans élaborés par le chanoine Georges Bouillon. Expert du style néogothique, cet architecte autodidacte, qui a déjà aménagé la basilique Notre-Dame de Montréal, opte plutôt pour un décor néobaroque, plus cohérent avec l’extérieur. En plus de présenter de nombreux éléments sculptés, dorés ou peints de couleurs claires, le montage comprend des pièces inédites, comme une tribune ouverte sur le chœur et un baldaquin, aujourd’hui illuminé de 900 ampoules. En 1903 s’ajoute la chaire, fabriquée par Simon Lavoie, un artisan local de 20 ans. Un orgue Casavant débarque en 1905.
Des éléments des églises précédentes, qui ont survécu à leur démolition, sont également intégrés dans cette somptueuse demeure. On peut penser au maître-autel ouvragé en 1802 par François Baillairgé et à La Madone des anges, de l’important peintre italien Carlo Maratta.
Dans tout ce faste, le chemin de croix ne pouvait pas être négligé. Narcisse Rioux, un riche négociant de Québec et Pistolois de naissance, acquiert et offre généreusement les tableaux d’Alexandre Cabanel, un des plus grands peintres français du Second Empire. À part à Trois-Pistoles, on peut admirer son travail au Musée du Louvre et au Musée d’Orsay. Rien que ça.
En 1954, un vaste chantier de restauration est mené par les Arts appliqués de Québec, sous la direction de l’artiste peintre d’origine italienne Mario Mauro. Les tableaux et le chemin de croix sont remis à neuf, et un faux-fini de marbre est ajouté aux colonnes.
Depuis, l’église Notre-Dame-des-Neiges a vu neiger. Mais comme une première neige, son caractère grandiose a toujours un effet féerique chez qui la découvre.